Une décision clé du Comité du patrimoine mondial en 2017 a été le retrait du Parc national de la Comoé en Côte d'Ivoire de la Liste du patrimoine mondial en péril, suite aux conseils de l'UICN. L'UICN – l’organisation consultative sur la nature pour la Convention du patrimoine mondial – a parlé avec Adama Tondossama, Directeur Générale de l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves (OIPR), l'autorité responsable des parcs nationaux en Côte d'Ivoire.
Le Parc national de la Comoé en Côte d’Ivoire est le premier site du Patrimoine mondial d’Afrique de l’Ouest et centrale en plus de dix ans à être retiré de la Liste en péril. La région compte 20 sites naturels du Patrimoine mondial, qui accueillent des espèces emblématiques comme les grands singes, les grands félins, les éléphants et les rhinocéros. Cependant, du fait de l’instabilité de la région, 10 de ces sites sont classés « en péril », depuis des décennies pour certains d’entre eux.
Suite à la stabilisation de la situation politique en 2012 en Côte d’Ivoire, la gestion efficace du Parc national de la Comoé s’est avérée concluante. Une mission de terrain de l’UICN en 2017 a confirmé que les populations d’espèces y sont en augmentation pour la première fois depuis presque 15 ans, y compris pour les populations de chimpanzés et d'éléphants, que l’on croyait disparus du parc.
Entretien avec Col. Adama Tondossama, Directeur Générale de l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves (OIPR)
Le parc de la Comoé a été retiré de la Liste du patrimoine de péril, selon les recommandation de l’UICN et du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
Cette décision est la reconnaissance des efforts déployés par le Gouvernement ivoirien à travers l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves (OIPR) et ses partenaires techniques et financiers pour une gestion efficace du Parc national de la Comoé. Les conseils de l’UICN et de l’UNESCO traduisent également les défis à relever pour maintenir et renforcer les acquis de ces dernières années dans le cadre de la gestion de ce site du patrimoine mondial en Côte d’Ivoire.
Qu’est-ce que cette décision change pour le site, pour le pays, et pour la population locale ?
C’est un encouragement à la Côte d’Ivoire pour tous les indicateurs macroéconomiques actuellement au vert. La situation socio-politique et économique relativement stable est ainsi reconnue dans un certain sens, car la Côte d’Ivoire environnementale c’est aussi les parcs nationaux et réserves naturelles dont le plus grand parc reste le Parc national de la Comoé.
Bien plus, cette décision traduit l’appel lancé au Gouvernement ivoirien à continuer son appui, à maintenir un climat des affaires propices, aux partenaires techniques à renforcer leur soutien et aux populations locales à continuer leur implication dans la gestion du site.
Pour le site, cette décision est le signe d’une ère nouvelle à la veille de son cinquantenaire qui sera célébré l’année prochaine. Le site peut désormais envisager un volet important de sa gestion, à savoir la promotion et la valorisation touristique. Cette décision donne le signal que les opérateurs économiques peuvent investir en relation avec l’Etat, dans des partenariats durables, dans l’écotourisme pour générer davantage de retombées pour les populations.
C’est aussi le premier site en Afrique de l’Ouest et Centrale à sortir de la Liste en péril, et une source d’inspiration pour les autres parcs en péril. Quel est votre message aux autorités et personnels de ces parcs ?
C’est un véritable honneur et une réelle émotion d’avoir apporté une modeste contribution de la Côte d’Ivoire à travers l’OIPR à cet état de fait. C’est également la reconnaissance qu’une mobilisation accrue autour d’un objectif commun, soutenue par des équipes motivées, est un gage de réussite.
C’est pourquoi notre message aux autorités et aux personnels de ces parcs encore inscrits sur la Liste du patrimoine mondial en péril est de resserrer les liens et de se mobiliser davantage autour d’un objectif commun. Dans ce cadre, il faudra disposer d’un plan d’actions qui doit être régulièrement évalué pour s’assurer de sa bonne exécution. Cela ne saurait se faire sans, d’une part, une contribution financière importante de l’Etat pour motiver les équipes, une forte implication de toutes les parties prenantes notamment les populations locales et les organisations de la société civile, et d’autre part, une forte mobilisation des partenaires techniques, financiers et scientifiques, à tous les niveaux de gestion de ces sites.
Quel type de soutien avez-vous reçu de la part de l’UICN pour améliorer la conservation du site ?
L’UICN, en tant qu’organisation de référence en matière de biodiversité, a apporté au début de notre initiative de relancer la conservation du parc national de la Comoé, resté dix ans durant sans aucune mesure de gestion du fait de la crise survenue en Côte d’Ivoire durant la période 2002-2010, un appui technique et financier.
Dans ce cadre, elle a apporté un appui technique et financier pour l’élaboration du plan d’aménagement et de gestion du Parc national de la Comoé pour la période 2015-2024. Elle a également administré pour des fonds de partenaires, notamment le Fonds Africain du Patrimoine mondial, pour des actions au Parc national de la Comoé. Elle a ainsi contribué à renforcer les capacités de nos équipes d’intervention dans la lutte contre le braconnage.
Ensuite, elle a apporté son expertise dans l’élaboration et la mise en œuvre de nos stratégies de suivi biologique, en particulier pour le suivi des éléphants. Elle a accompagné les gestionnaires du parc dans l’implication des communautés et des collectivités dans la conservation du parc. Enfin, à distance et de façon ininterrompue, elle apporte conseils à nos équipes de gestion. La plupart des évaluations de l’efficacité de gestion du site, ont été accompagnées par l’UICN.
Quelles sont les prochaines étapes à anticiper afin que les améliorations continuent ?
Le premier défi reste la communication pour le changement de comportement des populations riveraines en faveur de la conservation des ressources naturelles aussi bien à l’intérieur de l’aire protégée mais aussi en périphérie. Et pour cela, des actions durables pour l’amélioration du bien-être de ces populations restent à développer. Ce sont essentiellement les projets communautaires et générateurs de revenus.
L’autre défi reste la poursuite des aménagements dans le parc en terme de pistes et d’infrastructures pour maintenir les activités ordinaires de gestion de nos équipes, chose actuellement en cours avec la Coopération financière allemande.
Enfin, les partenariats avec les opérateurs économiques pour la valorisation touristique de ce site du patrimoine mondial en respectant les principes écologiques et de durabilité.
Le parc national de la Comoé a été inscrit au Patrimoine mondial en 1983 et en 2003 a été classé sur la Liste du patrimoine en péril. Le statut ‘en péril’ lui a été retiré à la 41e session du Comité du patrimoine mondial, qui s’est tenu à Cracovie, en Pologne, du 2 au 12 juillet 2017.
Découvrez le communiqué de presse de l’UICN sur le parc de la Comoé, y compris une séquence exclusive d’un caméra-piège dans le parc, fournie par l’OIPR.